Art Aborigène nov 2024
- November 02, 2024 - December 15, 2024
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- Artwork
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- Artists
Sans Titre
- 90 x 127 cm
- Naata Nungurrayi
Naata, au moment où elle s’éteint en 2021, est l’une des doyennes aux connaissances immenses et célèbres artistes de Kintore.
Elle est née au début des années 1930, probablement 1932, à Kumilnga, un site très isolée du bush, en plein cœur du Désert de Gibson, en Australie Occidentale. Elle va connaître une vie très traditionnelle, se déplaçant en fonction des rythmes saisonniers et des cérémonies. Son premier mari, avec qui elle aura deux enfants, dont Kenny Williams Tjampitjinpa (né vers 1950) qui deviendra plus tard un artiste réputé, meurt durant l’été 1961/1962. C’est une période difficile, les sécheresse répétées rendent difficile la quête de nourriture et d’eau. Une partie des Pintupi ont déjà rejoint Papunya ou Haasts Bluff où des rations alimentaires sont distribuées. L’idée germe de rejoindre ces derniers et trouver des conditions de vie plus clémentes. Accompagné d’un autre groupe qui comprend Yala Yala Gibbs Tjungurrayi et ses femmes Ningura Napurrula et Yinarupa Nangala (ils deviendront tous les trois des peintres reconnus), ils marchent vers l’Est, sur 400 km. C’est ainsi qu’en 1963 (1964 selon d’autres sources), une patrouille de la Welfare Branch, mené par Jeremy Long les localise en apercevant la fumée des feux de leur campement et les amène vers Papunya, une communauté aborigène créée par le gouvernement avec l’idée d’y sédentariser les derniers nomades.
On le sait bien aujourd’hui, Papunya, à l’époque offre un cadre peu favorable aux Aborigènes. Séparés de leur terre traditionnelle et de leur source de nourriture, pouvant à l’époque accéder à l’alcool, vivant parfois au milieu de tensions entre différents groupes linguistiques, les Aborigènes connaissaient une augmentation significative de leur taux de mortalité déjà élevé. Naata et sa sœur Nancy, dont elle restera très proche jusqu’au décès de Nancy, ont commencé à travailler dans la cuisine communautaire, où elles aident à fournir des repas et des rations.
Naata quittera Papunya pour rejoindre un moment Docker River à la fin des années 1970, puis pour une brève période les « oustations » de Yaiayi et Waruwiya, à environ 50 kilomètres à l'ouest de Papunya, avant de s’installer à Kintore (Walungurru), lorsque cette région est rendue aux Pintupi, les propriétaires traditionnels de ces terres, au début des années 1980. Elle se rapproche enfin de « ses terres », les sites dont elle est la gardienne spirituelle.
En 1994, un atelier est organisée entre les femmes de Haasts Bluff, qui peignent déjà, et celles de Kintore et Kiwirrkura qui auront accès au matériel seulement deux ans plus tard. Naata, en tant que doyenne, y participe. Sa carrière commence donc sérieusement en 1996 lorsque la coopérative artistique distribue des toiles aux femmes Pintupi. Son style, au début assez classique, va évoluer.
Les peintures de Naata représentent de façon symbolique « son pays » Walawala ainsi que les cérémonies des femmes autour du site de Marrapinti, un point d'eau sacré à l'ouest de Pollock Hills. D'autres sites sacrés et les lieux où s’arrêtèrent les Femmes Ancestrales qui voyageaient aux Temps du Rêve sont une source importante d’inspiration comme le trou de roche de Ngaripunkunya à l'ouest de Kiwirrkurra ; le trou rocheux de Wirrulnga à l'est de Kiwirrkurra, ou le très beau site de Ngaminya au sud et encore les cuvettes argileuses de Wanku et Piti Kutjarra, auxquels il faut ajouter un lieu sacré important pour Naata, Karilwara.
Ses histoires, schématisées par Naata dans ses compositions, dépeignent ses Femmes Ancêtres cueillant des Kampurapara (raisins du désert) dont on peut tirer une sorte de farine dont on fera un pain. La topographie n’est pas oubliée, et Naata nous donne des détails sur l’environnement de ces sites, comme les dunes (Thali / Tali), les affleurements rocheux (Puli) et la végétations.
A une période, vers la fin des années 1990 et début 2 000, de nombreuses compositions se composent de formes en fer à cheval, des motifs assez grands, qui emplissent la toiles. Elles peuvent se référer à la fois aux Femmes Ancestrales mais aussi, puisqu’il y a souvent de multiples niveaux d’interprétation, aux formes topographiques des sites décrits mais aussi, peutêtre, aux peintures corporelles utilisées pour les cérémonies. Peu a peu sa palette s’élargit, elle mixe les couleurs brillantes et chaudes aux roses et jaunes plus doux et le style devient plus contemporain, abandonnant parfois le bâtonnet pour une large brosse (ou parfois utilisant les deux techniques sur la même toile) et donnant ainsi un côté très personnel à ses compositions. Surtout, comme d’autres artistes importantes, elle se forge un style très personnel.
Vers la fin de sa carrière, ces motifs tendent à disparaître et le site de Marrapinti devient la source principale de sa production. Ce site est important pour les Pintupi. C’est là que des Femmes Tingari, au Temps du Rêve, s’arrêtèrent, cherchant de la nourriture, réalisant des rituels et confectionnant les bâtonnets que les initiés se mettent parfois à travers la cloison nasale. Mais ses compositions précédentes ont permis à Naata de développer de nouvelles idées, d’approfondir son sens de l’espace, et lui donner une certaine idée de comment se forger une voie personnelle tout en restant fidèle à la tradition. Ces leçons seront utiles jusqu’au bout. Les couleurs chaudes marquent cette série où les déclinaisons de brun / ocre, d’orange, de jaune prennent largement le dessus. Peu à peu, en avançant dans le temps, plus le rouge et des touches de mauve, qui viennent former un contraste très fort avec un blanc, prennent le dessus. C’est qu’elle partage son temps entre l’atelier d’un marchand indépendant, Christopher (Chris) Simon et le centre d’art. Chez Chris Simon, elle peint sur un fond rouge, pas un rouge /ocre mais un rouge franc. Elle peint les motifs traditionnels, ceux qui racontent l’histoire, avec du noir et termine avec les couleurs qui apportent une lumière et des contrastes auxquels on est peu habitué avec les peintures qui sortent du centre d’art où les ocres sont d’avantage présents. Les toiles confinent au sublime et la puissance comme le sentiment de vitalité qui s’en dégagent a peu d’égale dans l’art aborigène.
Bientôt en fin de carrière, Naata n’a plus la force de peindre le fond pointilliste et va se concentrer sur les motifs ancestraux. Elle va notamment puiser dans des motifs de pétroglyphes vus lorsqu’elle était jeune. On avait vu certains artistes qui ne parvenaient plus à réaliser des œuvres abouties à la fin de leur vie, à donner de la force à leurs compositions. Pour avoir pu voir les dernières toiles de Naata, elle était parvenue à trouver la ressource nécessaire pour donner de la puissance à ces motifs. Sans doute a t-elle puisée dans l’étendue de ses connaissances tribales, dans l’attachement viscéral que peuvent avoir certains initiés à « leurs » terres pour trouver le souffle nécessaire. Elle avait peint souvent à côté de « Miss » Bennett, qui a également produit des chefs d’œuvre dans les mêmes conditions. Elle a été capable de peindre des compositions géométriques, cérébrales, et de passer à un style plus organique, plus fluide. Mais un grand sens de l’harmonie se dégage de la plupart de ses œuvres. On voit peu d’artistes aborigènes qui ont pu passer d’un style à l’autre. Comme beaucoup d’Aborigènes restés proche de la tradition, elle ne soignait pas son apparence. Mais elle possédait une présence rare et son regard terriblement perçant semblait voir plus loin que les gens ordinaires. Elle a participé à des expositions prestigieuses. On peut retenir en 1999, Twenty Five Years and Beyond au Flinders University Art Museum (Adelaide) et l’année suivante la prestigieuse exposition Papunya Tula : Genesis and Genius à l’Art Gallery of New South Wales (Sydney).
Elle reçoit en 2002 un prix spécial au National Testra Award qui se déroule chaque année au Art Museum de Darwin. La même année un timbre australien reproduit l’une de ses toiles.
En 2003, saluée par la critique, elle est élue par un jury de professionnels parmi les 50 « most collectable » artistes australiens. Avant de mourir, elle voit deux de ses œuvres se vendre à près de 150 000 euros aux enchères, une reconnaissance méritée pour cette grande dame du Désert Occidental.
Ses œuvres figurent dans d’importantes collections publiques et privées dont :
National Gallery of Australia, Canberra Australian National University, Canberra The Holmes a Court Collection Art Gallery of New South Wales, Sydney National Gallery of Victoria, Melbourne Museums & Art Galleries of the Northern Territory, Darwin Australian Institute for Aboriginal and Torres Strait Islander Studies, Canberrra Artbank, Sydney Aboriginal Art Museum, Utrecht, The Netherlands Araluen Art Centre, Alice Springs Griffith University Art Collection, Brisbane Art Gallery of South Australia, Adelaide Helen Read Collection Harland Collection Hank Ebes Collection, Melbourne The Luczo Family Collection, USA University of Technolgoy Sydney Art Collection, Sydney Harvard Art Museums, Cambridge, MA, USA Steve Martin & Anne Springfield Collections, USA Kluge-Ruhe Collection of the University of Virginia, USA University of the Sunshine Coast Collection, Sippy Downs, QLD Luciano Benetton Collection, Venice
Gillian & Watson McAllister Collection, Sydney
Pat Corrigan Collection, Sydney
Jacqui McPhee Collection, Perth
Fondation Burkhardt-Felder Arts et Culture, Motiers, Switzerland
SmithDavidson Collection, Amsterdam and Miami
Prix et Récompenses :
2008 Ian Mclean: Publication: Naata Nungurrayi; Muni (Rita) Simpson; Spinifex Artists Group; Patrick Tjungurrayi. Perth, W.A.: Art Gallery of Western Australia 2008 Western Australian Art Award, Perth - Finalist 2008 25th NATSIAA, Darwin - Finalist 2007 TogArt Contemporary Art Award, Darwin Convention Centre, Darwin Finalist 2007 24th NATSIAA, Darwin - Finalist 2006 23rd NATSIAA, Darwin - Finalist 2005 22nd NATSIAA, Darwin - Finalist 2004 Top 50 Collectable Artists, Australian Art Collector Magazine 2003 Australia Post International Stamp 2003 20th NATSIAA, Darwin - Finalist 2002 19th NATSIAA, Darwin - Finalist and Highly Commended 2001 18tth NATSIAA, Darwin - Finalist 2000 17th NATSIAA, Darwin – Finalist
- Inventory Number: 58-24