- Bernadine Johnson Kemarre
- Bush Medicine leaves
- Acrylique sur toile
- 76 x 94 cm
- Inv: 41-25
Groupe linguistique : Aranda / Anmatyerre – associée à la communauté d’Utopia
Née en 1965 à Ltyentye Apurte, autrement appelée Santa Teresa, au cœur de l'Australie Centrale, Bernadine grandit entourée des mythes de ses aînés, ceux du Temps du Rêve. Très tôt, dans ce lieu isolé mais dense par la mémoire, elle apprend les histoires associées aux Rêves, les danses, les cérémonies, les récits des plantes et des aliments qui nourrissent mais aussi soignent. Ces savoirs sont transmis par ses parents, ses oncles et ses tantes.
À l’adolescence, Bernadine quitte le cœur du désert pour l’école à Alice Springs — un choc d’espaces clos, de langues et de rythmes étrangers aux siens. Pourtant, ce déracinement n’efface pas les images : au contraire, il aiguise le regard. Retenus dans la mémoire, les motifs du pays, les feuilles de médecine, les pétales, les graines, les formes de la terre et du ciel qu’elle avait vues enfant se mettent peu à peu à habiter son geste.
Peintre contemporaine aborigène, elle appartient à une lignée d’artistes des cousins, des sœurs de cœur, des maîtres invisibles, des femmes du désert — dont la puissance créatrice est aussi une responsabilité. Elle est marié à l’artiste Stephen Martin Pitjara (Petyarre), le frère d’Anna Price Petyarre. Il était donc tout naturel que Baradine se mette à peindre. Leurs œuvres irriguent le sien, non par imitation, mais par résonance : ce sont les mêmes histoires, les mêmes ancêtres, les mêmes étoiles.
Son style se révèle dans la finesse et la force : des feuilles de médecine presque palpables, des motifs de plantes sacrées, des tiges, des pétales ou des fleurs qui éclatent sur la toile. Elle utilise des coups de pinceau vifs, nets, précis, parfois symétriques, parfois libres. Les couleurs sont lumineuses verts, jaunes, ocres, bleus ou rouges — éclats de vie dans un environnement souvent austère. Pour nous, lieu hostile, pour les Aborigènes, c'est un lieu baigné de vie. Autour des formes végétales, elle tisse de petits points blancs, semences invisibles à l’œil nu mais essentielles — signes de régénération, de germination, de vie qui ne s’éteint pas.
Les « Bush Medicine Leaves » sont un thème central : ces feuilles sacrées, médicinales, cueillies par les femmes, mêlées à la graisse de kangourou, utilisées pour soigner blessures, piqûres, brûlures. Dans ses toiles, ces feuilles deviennent plus que botanique : elles sont symboles, mémoire, voix des femmes, lien entre le visible et l’invisible. Et puis il y a aussi l'igname (Yam, Pencil Yam ou Bush Yam), nourriture de la terre, racine cachée dans le sol, aliment humble mais vital, tissu de survie pour des communautés. Elle peint ses fleurs, ses racines — toujours avec ce rapport intime entre ce qui se mange, ce qui soigne, ce qui raconte